Les Mauritaniens, particulièrement les habitants de Nouakchott, ont vécu un mois d’août particulièrement difficile. En effet, au moment où les pontes du parti El INSAF célébraient avec grandes pompes le 4ème anniversaire de l’arrivée du Président Ghazouani à la tête de l’Etat, en mettant en avant ses «grandioses réalisations» à travers des reportages et autres manifestations, les citoyens étaient confrontés à une série de difficultés inédites qui rendaient leur quotidien presque invivable. Une coïncidence troublante au point que certains esprits malins n’ont pas hésité à parler de «sabotages» pour polluer justement cet anniversaire.
Quoi qu’il en soit, la vérité est que depuis le début du mois d’août, des habitants de la capitale sont confrontés à une pénurie d’eau potable chez eux. Les autorités ont expliqué au départ que ces coupures étaient liées aux fortes pluies du mois de juillet qui ont rendu les eaux du fleuve Sénégal plus boueuses et plus difficiles à traiter. Et aujourd’hui encore, malgré les sorties télévisées, les visites inopinées et visites programmées des autorités mauritaniennes, le limogeage du Directeur Général de la SNDE et de son adjoint, l’approvisionnement des ménages en eau continue de se faire au compte-gouttes.
Les délestages jouent sur les nerfs des habitants de Nouakchott
Comme si cela ne suffisait pas, Nouakchott vit en plus au rythme des délestages. Là également, la SOMELEC, avait imputé ces désagréments à une panne sur la ligne à haute tension qui transporte l’énergie du barrage hydroélectrique de Manantali au Mali vers le Sénégal et la Mauritanie. Mais avec la multiplication des coupures, parfois à un rythme insupportable, la SOMELEC ne communique plus. Il faut reconnaitre qu’il est difficile de trouver des explications convaincantes à une situation où le courant est coupé toutes les trente minutes, avant d’être rétabli pour une dizaine de minutes avant d’être coupé à nouveau pour 10 minutes, et ainsi de suite toute la journée ! Des boulangers ont dû avoir recours aux groupes électrogènes qui coûtent excessivement cher, pour pouvoir continuer à produire du pain tandis que plusieurs ménages affirment avoir souvent perdu tous leurs produits périssables, comme le lait frais ou la viande, qui étaient stockés dans les réfrigérateurs.
Les oignons aussi…
Pour corser davantage la situation, tous ces désagréments sont arrivés au moment où les Mauritaniens faisaient face à une pénurie sans précédent d’oignons entrainant une flambée des prix exceptionnel. Le kilogramme est ainsi passé en quelques jours de 200 ouguiyas anciens à 1.000 ouguiyas, soit une hausse de 233% par rapport à la période d’avant crise. Ingrédient indispensable à la cuisine, de grandes quantités sont utilisées pour la préparation de certains plats (riz à la viande, yassa, sauces à la viande…). Cette carence peut trouver son explication dans la quasi absence de cette culture en Mauritanie. Autre fait corsant davantage l’addition, l’oignon marocain n’arrive plus sur les étals des marchés mauritaniens. L’explication officielle étant les effets négatifs des deux années de sécheresse qui ont impacté sur la production marocaine d’oignon. Une baisse de la production qui s’était fait sentir même au Maroc où le kilogramme d’oignon avait flambé, en février dernier, pour atteindre les 18 dirhams le kilogramme. C’est à cette date que les autorités marocaines ont décidé d’interdire l’exportation de certaines légumes, dont l’oignon et la pomme de terre, afin de juguler la hausse des prix sur le marché local. Cette mesure a eu pour effet collatéral, les pénuries en Mauritanie et au Sénégal et dans une moindre mesure dans d’autres pays de la sous-région, notamment au Mali.
…Et les rats quittent le navire !
Face à cette situation de plus en plus difficile, il ne fallait donc pas s’étonner de voir les «rats quitter le navire». Durant cette période, la ruée des jeunes mauritaniens vers les Etats Unis d’Amérique s’est poursuivie à un rythme soutenu. De plus en plus de Mauritaniens préfèrent rejoindre les États-Unis plutôt que l’Europe. Depuis Madrid, en Espagne, beaucoup tentent de gagner Tijuana, au Mexique, en passant par l’Amérique du Sud. Une route migratoire peu connue et très risquée. Il faut dire que les récentes success stories de compatriotes vivant aux États-Unis, mises en avant sur les réseaux sociaux, ont fait du pays de l’Oncle Sam un nouvel eldorado dans l’imaginaire collectif. Un phénomène qui concerne essentiellement les hommes – très majoritaires –, mais aussi les femmes, qui n’hésitent pas, parfois, à prendre la route avec des enfants. Brésil, Équateur, Colombie, Panama, Costa Rica, Nicaragua ou encore Salvador sont désormais des noms qui résonnent dans les conversations lorsqu’on prend des nouvelles des émigrés et qu’on s’échange les « bons plans » pour préparer son voyage. Les vidéos postées sur TikTok montrent des Mauritaniens lors des différentes étapes du périple, entre voyages en bus et longues marches en forêt. D’autres se filment en train d’escalader le mur entre le Mexique et les États-Unis. Ce voyage est extrêmement coûteux, périlleux et épuisant.
Parmi les premières conséquences de cette ruée, le pays elle confronté à une «pénurie» de passeports courants de 30.000 UM. Selon les autorités, la demande sur les passeports a passé de vingt mille en 2020 à quatre-vingt-quatorze mille passeports en 2023, ce qui a conduit l’ANRPTS à faire deux commandes supplémentaires dont la première sera à Nouakchott à la fin du mois de septembre, prochain.
Pendant ce temps…
EL INSAF, le parti du Président Ghazouani, s’apprête à conclure un pacte politique avec l’Union des Forces de Progrès (UFP) et le Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), deux formations historiques de l’opposition non représentées à l’Assemblée nationale. Survenant quelques mois après des élections générales contestées, ce pacte devrait porter sur plusieurs sujets : unité nationale, droits humains, cohésion sociale, pluralisme démocratique, processus électoral… Mais le document qui a fuité sur la Toile, fait l’objet de vives critiques de la part de l’opposition parlementaire.
Comme quoi, les priorités ne sont pas partout les mêmes !
Sikhousso