Depuis quelques semaines, le Président Ghazouani semble «accélérer la cadence», comme on dit de l’autre côté du Fleuve. En effet, ayant pris la mesure des difficultés auxquelles sont confrontés les citoyens, particulièrement ces derniers mois, il semble vouloir prendre le taureau par les cornes pour secouer le cocotier. Il faut dire que jusque-là il avait adopté un mode de gouvernance qui s’est finalement révélé inadapté à la mentalité des Mauritaniens.
Vouloir responsabiliser les ministres et leur laisser toute la latitude pour conduire les actions qui relèvent de leur département est certes louable, encore faut-il que ces derniers soient à la hauteur des défis auxquels ils doivent faire face. Ce qui ne semble pas être le cas, si l’on s’en tient aux dernières sorties du Président de République.
Crise de l’eau, l’élément déclencheur
La pénurie d’eau sans précédent qu’a connue la ville de Nouakchott – et qui n’est pas encore résolue – a été sans aucun doute la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Sans mauvais jeu de mot ! Après plusieurs jours, durant lesquels les robinets sont restés désespéramment secs, et des explications alambiquées, qui ne tiennent pas la route et qui n’ont convaincu personne, le Président de la République a décidé d’aller lui-même s’enquérir de la situation. A cette occasion il a visité la station de pompage sur le pk 40 le long du fleuve Sénégal, puis le Président de la République s’est déplacé au village de Beni Naaji, près de Keur Macene, pour visiter l’usine de filtration et de traitement des eaux ; enfin, il a conclu l’inspection par la station de filtrage à 17 km de l’entrée de Nouakchott. Sur tous ces sites, le Président de la République a tenu à examiner de plus près les causes de l’interruption du réseau d’adduction d’eau de la ville de Nouakchott et en adressant des instructions directes aux responsables. Il leur a intimé l’ordre de trouver des alternatives pour atténuer la souffrance des citoyens et déployer des efforts sérieux pour développer des solutions durables aux problèmes affectant l’approvisionnement régulier en eau potable des habitants par les canalisations côtières. Une visite à l’issue de laquelle le Directeur Général de la SNDE et son Adjoint ont été limogés.
Les ministres et les secrétaires généraux mis devant leur responsabilité
Poursuivant sur sa lancée, le Président Ghazouani a réuni les ministres et les secrétaires généraux devant lesquels il a tenu un discours musclé, contrairement à son tempérament habituel. Est-ce à la suite d’un constat de gabegie dressé après la crise de l’eau à Nouakchott ? Le président inaugure-t-il déjà sa campagne électorale avant l’heure ? Le ton est en tout cas donné. Toujours est-il que le Président Ghazouani semble peu satisfait de son administration. C’est pourquoi il tente de secouer le cocotier à une encablure de la future présidentielle. Le limogeage du Directeur Général de la SNDE et de son adjoint pourrait être le prélude d’une chasse aux mauvais responsables et autres prévaricateurs.
Un Président de plus en plus présent sur le terrain
Ceux qui pensaient que les dernières sorties du Président étaient un épiphénomène, qui allait s’estomper rapidement, commencent à se dire que c’est peut-être du sérieux. En effet, une nouvelle fois Ghazouani a effectué de nouvelles visites inopinées la semaine dernière pour s’enquérir de l’état d’avancement de certains projets et pour comprendre les causes des retards enregistrés. C’est ainsi qu’il s’est rendu successivement à la nouvelle extension des bâtiments universitaires (le nouveau complexe universitaire), le centre de données numériques de haut niveau et le projet d’échangeur de Haay Sakine. «Dans chacun de ces trois chantiers, le Président de la République s’est informé de l’avancement des travaux et leur niveau d’avancement, s’interrogeant sur les raisons des retards constatés dans les délais de mise en œuvre», rapporte l’Agence Mauritanienne d’Information. Le Président de la République «a exigé de tous les acteurs, à travers les départements concernés, de prendre, sans délai, les mesures qui s’imposent pour traiter chaque cas séparément dans les trois projets visités, appelant au respect des délais spécifiés, des normes de qualité, tout en abandonnant la manipulation des délais, considérant que de tels comportements ne seront plus acceptés», raconte le média.
Maintenant reste à savoir si cette nouvelle posture du Président est motivée par une réelle volonté de faire bouger les choses, ou s’il s’agit simplement de mettre à profit cette dernière année de son mandat pour obtenir des résultats palpables afin de s’assurer d’une réélection tranquille en 2024… S’il est candidat, bien sûr !
Sikhousso