La Mauritanie est à bout de souffle face à l’énorme pression migratoire. Selon une source gouvernementale, la Mauritanie fait face à une situation migratoire explosive avec l’afflux massif de réfugiés fuyant l’insécurité. Le flux de migrants sur le sol mauritanien a atteint un seuil critique.
La Mauritanie, située à plus d’un millier de kilomètres des Canaries, est devenue ces derniers mois un point de départ privilégié pour les migrants du Sahel désireux de rejoindre l’Europe. Sur les plus de 22 000 personnes arrivées dans l’archipel espagnol au cours du premier semestre 2024, 13 000 sont parties des côtes mauritaniennes, contre environ 200 personnes l’année précédente. Soit une augmentation de 6 000 %.
Et avec plus de 9 000 arrivées depuis janvier, les Maliens constituent désormais la nationalité la plus nombreuse parmi les immigrés arrivés de manière irrégulière en Espagne.
Mais ils ne sont pas les seuls. Les Sénégalais, qui fuient une crise économique et un taux de chômage très élevé dans leur pays, tentent aussi de traverser l’Atlantique depuis les côtes mauritaniennes.
La Mauritanie a annoncé à plusieurs reprises qu’elle était devenue une destination finale pour des centaines de milliers de migrants de différentes nationalités.
Le gouvernement a souligné à maintes fois que les migrants constituent un fardeau économique et social pour le pays, en insistant sur le fait que la situation sécuritaire complexe dans la région est la principale raison de l’afflux de migrants.
En effet, la détérioration du contexte sécuritaire dans la région entraine une intensification des flux de migrants irréguliers traversant la Mauritanie vers l’Espagne : c’est le message délivré en début de semaine par le ministre mauritanien de la Défense, Hanena Ould Sidi, lors du passage à Nouakchott de son homologue espagnole, Margarita Robles.
L’afflux en Mauritanie de réfugiés fuyant l’insécurité au Sahel a atteint « un seuil critique » et intensifie la migration clandestine vers l’Espagne et l’Europe, a alerte lundi dernier le ministre de la Défense Hanena Ould Sidi. « Le flux des réfugiés sur le territoire mauritanien a atteint un seuil critique » en raison de la situation sécuritaire au Sahel qui « continue de se détériorer », a déclaré le ministre de la Défense, qui recevait à Nouakchott son homologue espagnole Margarita Robles.
Endiguer le flux
« La détérioration des conditions sécuritaires dans la région entraîne une intensification du flux de migrants irréguliers traversant la Mauritanie vers l’Espagne », a-t-il ajouté.
‘’A cet effet, la Mauritanie compte sur l’appui du Royaume d’Espagne, tant au niveau du cadre bilatéral qu’au niveau du partenariat de notre pays avec l’Union européenne’’, a-t-il affirmé.
De son côté, la ministre espagnole de la Défense a exprimé ses remerciements au ministre de la Défense, des Retraités et des Enfants des Martyrs, et à travers lui, à la Mauritanie pour l’hospitalité et l’accueil chaleureux dont elle et sa délégation ont fait l’objet, soulignant que les relations hispano-mauritaniennes sont profondément enracinées dans l’histoire et couvrent tous les domaines liés aux intérêts communs des deux pays amis.
Elle a, outre, mis en exergue le soutien de son pays à la Mauritanie dans ses efforts de contrôle et de sécurisation de ses frontières.
La Mauritanie est située sur la route maritime empruntée par des dizaines de milliers d’Africains pour tenter de gagner l’Europe via l’Atlantique. L’archipel espagnol des Canaries représente sur cette route la première porte sur l’Europe.
Au 15 octobre, 32.878 migrants irréguliers étaient arrivés aux Canaries par la mer, contre 23.537 au cours de la même période l’année dernière, selon le ministère espagnol de l’Intérieur. Le gouvernement espagnol s’emploie auprès des pays ouest-africains à endiguer le flux.
L’afflux de réfugiés « constitue une forte pression économique, sociale et sécuritaire sur les régions d’accueil » de la Mauritanie, a dit le ministre mauritanien. Face à cette situation, Nouakchott « souhaite renforcer ses programmes de coopération avec l’Espagne et l’Europe en général, en matière de migration sûre, ordonnée et régulière », a-t-il ajouté.
Nouakchott et Madrid se sont engagés fin août à coopérer pour lutter contre les passeurs de migrants illégaux vers l’Europe et favoriser la migration légale, lors d’une visite dans la capitale mauritanienne du Premier ministre espagnol Pedro Sánchez.
Selon un récent rapport de l’agence dédiée de l’ONU (UNHCR), 275.000 réfugiés et demandeurs d’asile se trouvent actuellement en Mauritanie, pays d’environ 4,9 millions d’habitants.
Ils sont concentrés principalement dans le sud-est à la frontière avec le Mali, dont 112.000 enregistrés dans le seul camp de Mbera, saturé, dit l’agence. La majorité viennent du Mali, où ils ont fui l’insécurité et la faim, dit-elle.
La Mauritanie s’est signalée ces dernières années par sa stabilité par rapport au Mali, au Burkina Faso et au Niger, où prospèrent des jihadistes et autres groupes armés.
Seuil critique face aux flux de migrants
Depuis fin 2023, la Mauritanie connaît un afflux régulier de migrants. Elle reste un pays de transit pour de nombreux ressortissants d’Afrique de l’Ouest, avec cette année une hausse significative du nombre de migrants qui cherchent à emprunter la route de l’Atlantique pour rallier les Canaries. Des départs qui se font aussi du Sénégal ou de Gambie par exemple.
Le nombre de débarquements en Mauritanie a doublé entre 2023 et 2024. Mi-octobre, l’archipel espagnol des Canaries avait enregistré plus de 33 000 arrivées par la mer, contre 23 000 sur la même période l’an dernier.
Face à cette situation, Nouakchott souhaite coopérer davantage avec l’Espagne et l’Europe en général, affirme le ministre mauritanien de la Défense. En mars, une déclaration conjointe a été signée entre la Mauritanie et l’Union européenne pour renforcer le partenariat sur les migrations.
La Mauritanie est par ailleurs une terre d’asile pour de nombreux réfugiés. Ce ne sont pas des migrants, précise une source humanitaire. Au total, le HCR recense 275 000 réfugiés et demandeurs d’asile dans le pays. La région du Hodh Chargui, à la frontière avec le Mali dans l’est, accueille des réfugiés, maliens en grande partie, qui fuient la situation humanitaire et sécuritaire dans leur pays. Le camp de Mbera est désormais saturé, avec un pic de 20 000 personnes en janvier dernier, et les nouveaux arrivants s’installent désormais en dehors du camp.
« La Mauritanie accueille 400.000 réfugiés des pays du sahel »
La Mauritanie accueille entre 350 000 et 400 000 jeunes migrants du Sahel.Ce qui « équivaut à 10 pour cent de la population totale », a déclaré Mohamed Salem Ould Merzoug, ministre mauritanien des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Mauritaniens de l’extérieur.
Ould Merzoug s’exprimait lors de la cérémonie d’ouverture de la Conférence des donateurs pour le soutien aux réfugiés du Sahel et du bassin du lac Tchad, qui s’est tenue samedi dernier à Djeddah, en Arabie saoudite, en insistant sur la nécessité pour la Mauritanie de « bénéficier du mécanisme qui sera approuvé ».
Au cours de cette conférence, organisée par l’Organisation de la coopération islamique (OCI) en coordination avec le centre du roi Selmane pour les secours et les aides humanitaires, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), le ministre a passé en revue certains des efforts déployés par la Mauritanie en matière d’accueil des réfugiés.
« La Mauritanie accueille plus de 250 000 réfugiés maliens dans le camp de M’Berra, créé en 2012 », qui depuis plus d’un an a atteint sa capacité maximale », a dit le ministre, précisant que la Mauritanie “compte essentiellement sur ses propres ressources limitées”.
Cette surpopulation « a poussé de nouveaux réfugiés à se diriger vers d’autres villages de la wilaya déjà touchés par les effets du changement climatique », a déclaré Ould Marzouk avant d’ajouter qu’il « est naturel que cela génère des défis majeurs qui affectent négativement la coexistence pacifique et la fourniture d’eau, d’assainissement, d’abris et de nourriture sur un pied d’égalité avec les communautés d’accueil ».
Le gouvernement s’est engagé à intégrer les réfugiés dans les systèmes nationaux de protection sociale et d’éducation, et à transformer le camp de M’Berra en une institution humanitaire intégrée et durable », a déclaré Ould Merzoug.
« La Mauritanie a consacré une grande partie des ressources de ses forces de sécurité à la gestion de l’afflux de réfugiés et de migrants.Ce qui affecte leur capacité à répondre à d’autres défis en matière de sécurité », a conclu le ministre.
Entrée par effraction dans la scène politique
Oubliant leur statut, les réfugiés tentent ont fait récemment une entrée par effraction dans la scène politique locale d’où la colère des autorités mauritaniennes ont jugé l’implication des réfugiés dans la politique locale est inacceptable.
Le ministre de l’Intérieur, de la décentralisation et de la promotion du développement local, Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine, a déclaré que l’implication des réfugiés maliens dans la politique locale( Basiknou) est inacceptable.
Lors d’une visite, le mercredi dernier, au camp de réfugiés maliens de M’Berra, dans la moughata de Bassiknou,en compagnie du wali du Hodh Chargui Isselmou Ould Sidi et du chef d’état-major de la gendarmerie nationale, le général de division Abdallahi Ould Ahmed Aicha, le ministre de l’Intérieur a été catégorique. Selon lui, ‘’la Mauritanie accueille les réfugiés « en tant qu’hôtes, conformément aux normes et lois internationales et au bon voisinage », ajoutant que « les pratiques contraires à ce concept, telles que l’engagement dans la politique locale ou l’incitation au sectarisme sur le territoire mauritanien, sont inacceptables et peuvent conduire à des mesures strictes à l’encontre de leurs auteurs ».
La Mauritanie a élaboré un plan d’urgence visant à lutter contre la migration irrégulière et à promouvoir la résilience et l’intégration sociale des réfugiés.
Le plan multidimensionnel du gouvernement prévoit de permettre aux nouveaux arrivants de bénéficier d’une protection, de veiller à ce que les groupes les plus vulnérables reçoivent une assistance, tout en tenant compte des besoins des communautés d’accueil.
Aide financière de l’Espagne et de l’UE
Reste que cet afflux en Mauritanie « constitue une forte pression économique, sociale et sécuritaire sur les régions d’accueil » du pays, a encore dit le ministre mauritanien de la Défense. Face à cette situation, Nouakchott « souhaite renforcer ses programmes de coopération avec l’Espagne et l’Europe en général, en matière de migration sûre, ordonnée et régulière ».
La Mauritanie reçoit depuis des années des fonds de l’Espagne pour contrôler l’immigration vers les îles. Chaque année, Madrid verse 10 millions d’euros à Nouakchott pour la formation et l’équipement des gardes-côtes. En échange, le pays s’engage à accueillir sur le sol mauritanien les exilés entrés de manière irrégulière aux Canaries après avoir quitté le pays, et à bloquer les départs des canots.
Début février, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, se sont rendus en Mauritanie dans le but de développer leur coopération sur la question migratoire.
À l’issue de cette visite, Bruxelles a débloqué une enveloppe de 200 millions d’euros pour aider la Mauritanie à contrôler les flux de migrants.
Fin août, Pedro Sanchez est retourné à Nouakchott pour signer des « mémorandums d’entente » bilatéraux de « migration circulaire », selon un communiqué de la présidence espagnole. Il s’agit de mettre en place un cadre pour permettre des entrées régulières sur le sol espagnol en fonction des besoins de main-d’œuvre. Cette migration contrôlée est censée faire une place particulière aux jeunes et aux femmes. En retour, la présidence mauritanienne s’était engagée à durcir sa législation contre l’immigration irrégulière.
Saydou Nourou T.