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Éducation en Mauritanie : L’Ecole «Républicaine» face au défi de l’unité nationale en Mauritanie

La Mauritanie, pays riche en diversité culturelle et ethnique, fait face à des défis importants en matière d’unité nationale. L’école, en tant qu’institution clé de la société, joue un rôle crucial dans la promotion de l’identité nationale et de la cohésion sociale. L’école « républicaine », qui prône des valeurs d’égalité, de justice et de citoyenneté, doit être au cœur de cette dynamique. L’éducation en Mauritanie est donc un enjeu crucial pour le développement socio-économique du pays. Avec une population jeune en pleine croissance, le système éducatif doit faire face à des défis majeurs, notamment l’enseignement en langue arabe, la place du français, l’introduction des langues nationales dans le système éducatif. En effet, l’arabe est la langue officielle du pays et occupe une place prépondérante dans le système éducatif. Cependant, cette prédominance pose des défis, notamment pour les élèves issus de milieux où l’arabe n’est pas la langue maternelle.

Pays crée artificiellement par l’empire colonial français sur des réalités sociales différentes, la Mauritanie est composée d’une population très hétérogène. Unifié dans la religion musulmane, le peuple mauritanien est constitué de deux grands ensembles : l’ensemble arabe et l’ensemble négro mauritanien. L’ensemble arabe, lui-même réparti en deux sous-ensembles : les Maures blancs ou Beïdanes et les Maures noirs ou Harratines, descendants d’esclaves asservis par les Maures blancs. L’ensemble négro mauritanien, quant à lui, se répartit en trois sous-ensembles : les Halpoulars (Peuls), les Soninkés, les Wolofs. Une division conflictuelle incessante entre ces deux grands ensembles explique la dualité dans laquelle vit la Mauritanie, dualité traduite par une hétérogénéité culturelle et linguistique.

L’évolution du statut des langues en Mauritanie 

Si l’ensemble négro mauritanien a ses langues propres pour le domaine familial, il a toujours été favorable à l’enseignement du français. Le wolof, le soninké et le pulaar ont acquis le statut de langues nationales en 1979. Cependant, la scolarisation en langue nationale n’a pas dépassé le stade de l’expérimentation chez les populations négro mauritaniennes, considérée comme un ghetto les privant du français. En 1960, l’arabe était langue nationale et le français langue officielle. L’arabe est passé du statut de langue nationale au double statut de langue nationale et officielle, c’est à dire la langue de fonctionnement du système politique, la langue de scolarisation et des médias.

Le français, quant à lui, d’un point de vue juridique, est passé du statut de langue officielle dans la constitution de 1960 à celui de langue d’enseignement en 1999 puis à presque rien du tout aujourd’hui. C’est donc à juste titre que la politique d’arabisation a été perçue comme une entreprise d’assimilation culturelle par les populations négro mauritaniennes. Le français n’a en fait jamais été revendiqué comme une langue de l’unité nationale mais plutôt comme revendication ethnique de l’ensemble négro-mauritanien contre l’arabe et le peuple maure. Les divergences linguistiques ont fortement marqué le parcours politique de la Mauritanie de l’indépendance à nos jours, mettant le pays, par intermittence, au bord de la guerre civile : 1966, 1979, 1989. Elles ont aussi marqué l’évolution du système éducatif, dont les diverses réformes reflètent les tâtonnements des différents régimes qui ont gouverné le pays, pour trouver une solution satisfaisante pour tous et donc garante de paix sociale. Ainsi, le rapport conflictuel entre la langue arabe (arabe/hassanya) et les langues nationales transfère le conflit sur un autre terrain, l’école, dont le français est l’enjeu.

Depuis 1960, le pays aura ainsi connu six réformes du système éducatif qui sont des actes de politique linguistique. La place accordée au français, à l’arabe et aux langues négro-africaines a été l’objet de toutes ces réformes. Entre tentative d’arabisation et mesures d’apaisement, la question linguistique a donc été omniprésente. De 1979 à 1999, la Mauritanie s’est finalement divisée en créant deux filières scolaires : les enfants pouvaient s’inscrire soit dans la filière arabe, soit dans la filière bilingue (qui correspondait à un enseignement en français). La scission culturelle du pays se retrouvant ainsi sur les bancs de l’école dans des classes séparées. 

La dernière réforme, en 2O21, par sa réintroduction de l’arabe langue d’enseignement, marque la fin du bilinguisme et l’échec relatif de 40 ans de réformes du système éducatif. Le changement majeur est le retour à un enseignement unifié, mettant fin aux anciennes filières arabes et bilingues qui divisaient le pays et l’introduction progressive des langues nationales dans le système éducatif.

La nouvelle réforme en question

En premier lieu, la scolarisation massive ces dernières années et l’interdiction progressive de l’enseignement primaire aux écoles privées, ont entraîné un énorme besoin d’enseignants. Mais les centres de formation initiale (ENI) ne peuvent accroître démesurément leur capacité d’accueil. De nouveaux enseignants ont alors été recrutés, dans l’urgence. Certains étudiants de niveau licence ou maîtrise ont été sollicité directement à l’Université même si leurs disciplines étaient différentes de leurs futurs enseignements. Des formations accélérées leur ont permis de rejoindre des établissements scolaires le plus rapidement possible. Certaines formations accélérées ont même été réduites à cinq jours. Avec une formation initiale si brève, il n’est alors pas étonnant d’observer sur le terrain que nombre d’enseignants ne maîtrisent pas leur langue d’enseignement ou ne connaissent pas le contenu de leur enseignement.

Il y a non seulement une réforme des langues d’enseignement mais également des contenus et pédagogies d’enseignement. L’IPN a révisé tous les programmes et des nouveaux manuels scolaires ont été conçus pour chaque niveau. Mais l’édition et la distribution de ces manuels est loin d’être achevée… Les écoles fondamentales doivent encore « bricoler » comme elles peuvent. Des cours de mathématique ou de sciences dispensés en français sont assurés grâce à des manuels en arabe… Les enseignants s’indignent d’une mise en application aussi rapide, ils auraient souhaité avoir tout le matériel avant de se lancer dans une telle mission !

Des pages entières ne suffiraient pas à décrire tous les problèmes concrets qui entravent la réforme. Des retards matériels, des financements insuffisants, la situation précaire des enseignants, l’impossible reconversion linguistique de certains enseignants, des classes pléthoriques aux niveaux trop hétérogènes qui retardent les programmes… Mais derrière tous ces aspects techniques se cachent en filigrane des questions d’ordre culturel et identitaire qui sont encore loin d’être résolues. Le conflit ethnique est toujours d’actualité même si aujourd’hui il apparaît comme sous-jacent.

Un autre phénomène permet à cette situation conflictuelle de perdurer, c’est la position de certains parents d’élèves. Ils n’encouragent nullement leurs enfants à fournir des efforts dans la langue «adverse», la qualifiant d’inutile. Le mépris face à «l’autre» et à sa culture est encore frappant dans bien des régions et cela, dans tous les groupes. Par ailleurs, la pratique de la langue maternelle au foyer parental n’incite guère à approfondir les langues d’enseignement.

Malgré ces discours pessimistes sur la possibilité d’un bilinguisme futur, quelques ouvertures ne sont pas à négliger. En effet, si la génération adulte reste encore très scindée, les cours de récréations le sont beaucoup moins. Ceci est surtout visible dans les grandes villes qui regroupent les différents ensembles culturels. Gardons à l’esprit que ce bouleversement scolaire est loin d’être achevé et qu’une telle ambition nécessite patience et persévérance.

Entre arabité et africanité, la question identitaire fait encore débat en Mauritanie.  L’éducation en Mauritanie est à un tournant. Pour relever les défis actuels, il est impératif d’adopter une approche inclusive qui valorise toutes les langues et cultures présentes dans le pays. Cela nécessite des réformes structurelles, une formation adéquate des enseignants et un engagement fort des autorités. En surmontant les défis liés à la diversité culturelle et linguistique, et en adoptant une éducation inclusive et respectueuse des différences, l’Ecole peut devenir un véritable creuset d’intégration et de cohésion sociale.

Sikhousso

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