vendredi, décembre 26, 2025
Google search engine
AccueilActuAgrément des partis : une question administrative aux enjeux politiques majeurs

Agrément des partis : une question administrative aux enjeux politiques majeurs

Un groupe de partis politiques en cours de constitution a exprimé son impatience et son mécontentement face au retard prolongé dans la délivrance des documents juridiques définitifs leur permettant d’exercer officiellement leurs activités politiques. 
Dans une déclaration conjointe, ces formations affirment avoir rempli l’ensemble des conditions juridiques et administratives prévues par la loi relative aux partis politiques ainsi que par son décret d’application. Elles indiquent notamment avoir fourni toutes les recommandations et pièces requises et avoir obtenu des récépissés numériques préliminaires. Toutefois, elles déplorent attendre, depuis des périodes variables dépassant parfois six mois, la remise des documents juridiques définitifs, sans qu’aucune justification officielle ne leur ait été communiquée, si ce n’est que leurs dossiers « sont toujours à l’étude », sans précision sur la nature ou la durée de cette procédure.

Cette controverse née autour du retard dans la délivrance des récépissés définitifs à plusieurs partis politiques en cours de constitution dépasse largement le cadre administratif. Elle soulève des interrogations profondes sur l’état du pluralisme politique, l’égalité d’accès à la compétition électorale et la crédibilité des réformes démocratiques engagées ces dernières années en Mauritanie.

Un blocage administratif aux contours flous


Selon les formations concernées, l’ensemble des exigences prévues par la loi sur les partis politiques a été respecté : dépôt des dossiers complets, fourniture des recommandations, conformité aux critères organisationnels et obtention des récépissés numériques préliminaires. Pourtant, les récépissés définitifs, indispensables pour exercer légalement toute activité politique, tardent à être délivrés.
L’absence d’explications détaillées de la part de l’administration, se limitant à la formule générique de dossiers « toujours à l’étude », alimente un climat de suspicion. Ce flou administratif nourrit l’impression d’une procédure discrétionnaire, difficilement compatible avec les principes de transparence et de prévisibilité exigés dans un État de droit.


Le pluralisme politique à l’épreuve des pratiques


Dans un système démocratique, la reconnaissance des partis politiques constitue l’un des piliers du pluralisme. Le retard prolongé dans l’agrément de certaines formations, alors que d’autres obtiennent leur récépissé définitif, pose la question de l’égalité de traitement entre acteurs politiques.
Pour les partis concernés, cette situation crée un déséquilibre dans l’espace public, en limitant leur capacité à s’organiser, à mobiliser leurs bases et à participer aux débats nationaux. À terme, ce déséquilibre pourrait peser sur la crédibilité des processus électoraux et sur la confiance des citoyens dans l’équité du jeu politique.


Une mémoire politique encore sensible


Les références faites par les signataires à des périodes antérieures de « gel » et d’exclusion ne sont pas anodines. La vie politique mauritanienne a été marquée, par le passé, par des restrictions administratives ayant freiné l’émergence de nouvelles forces politiques.
En évoquant ces précédents, les partis en attente d’agrément cherchent à alerter l’opinion publique et les autorités sur le risque de voir ressurgir des pratiques que les réformes récentes visaient précisément à dépasser. Cette mémoire collective confère à la question actuelle une dimension symbolique et politique forte.


L’État face à l’impératif de neutralité


Du point de vue des autorités, la régulation du champ partisan s’inscrit dans une logique de respect de la loi et de prévention de l’anarchie politique. Toutefois, cette mission ne peut être crédible que si elle s’exerce dans un cadre strictement neutre, transparent et équitable.
Le rôle du Ministère de l’Intérieur, de la Décentralisation et du Développement local, en tant qu’unique autorité habilitée à délivrer les récépissés, devient dès lors central. Toute perception de sélectivité ou de lenteur injustifiée fragilise l’image de l’administration et alimente le discours de défiance porté par certaines forces politiques.


Une dynamique contrastée sur la scène partisane


L’octroi récent de récépissés définitifs à cinq partis politiques montre que le processus d’agrément n’est pas totalement à l’arrêt. Cette dynamique contrastée — reconnaissance de certaines formations et attente prolongée pour d’autres — renforce toutefois le sentiment d’incohérence du système.
Pour les observateurs, cette situation révèle les tensions inhérentes à une phase de recomposition du paysage politique, marquée à la fois par la volonté d’encadrer le pluralisme et par l’émergence de nouvelles ambitions partisanes.


Enjeux démocratiques et crédibilité institutionnelle


Au-delà du sort immédiat des partis en attente, la question des récépissés engage la crédibilité des institutions et la confiance des citoyens dans les règles du jeu politique. Un pluralisme perçu comme administrativement contraint ou politiquement orienté risque de nourrir l’abstention, la désaffection citoyenne et la contestation extra-institutionnelle.
À l’inverse, une clarification rapide des procédures, accompagnée de délais clairement définis et respectés, pourrait renforcer la légitimité de l’État et consolider l’ancrage démocratique du système politique.

Ces formations affirment avoir rempli l’ensemble des conditions juridiques et administratives prévues par la loi relative aux partis politiques ainsi que par son décret d’application. Elles indiquent notamment avoir fourni toutes les recommandations et pièces requises et avoir obtenu des récépissés numériques préliminaires. Toutefois, elles déplorent attendre, depuis des périodes variables dépassant parfois six mois, la remise des documents juridiques définitifs, sans qu’aucune justification officielle ne leur ait été communiquée, si ce n’est que leurs dossiers « sont toujours à l’étude », sans précision sur la nature ou la durée de cette procédure.
Les partis concernés estiment que cette situation constitue une atteinte à un droit constitutionnel fondamental, ainsi qu’une violation des principes d’équité, d’égalité et d’égalité des chances entre les acteurs politiques. Ils mettent en garde contre une persistance de pratiques rappelant, selon eux, les mécanismes d’exclusion et de gel qui avaient marqué la vie politique sous les législations antérieures.
Appelant le ministère de tutelle à lever ce qu’ils qualifient de « blocage injustifié », ces partis demandent à être autorisés à exercer leurs activités légales dans les meilleurs délais, conformément aux textes réglementaires en vigueur, afin de préserver la crédibilité du processus pluraliste dans le pays. Ils ont par ailleurs réaffirmé leur engagement en faveur d’une action politique responsable, respectueuse des lois de la République, et leur détermination à poursuivre la lutte pour le renforcement de la vie démocratique et le droit des citoyens à s’organiser, à s’exprimer et à participer à la vie publique.
La déclaration a été signée par le Parti populaire progressiste, le Parti du renouveau démocratique (Tehady), le Parti de l’urbanisme, le Rassemblement national démocratique de la jeunesse (Techawour), le Parti de l’union des forces du changement (Al-Ittihad) et le Parti pour une Mauritanie forte.

Reconnaissance à cinq partis politiques

Pour rappel, le Ministère de l’Intérieur, de la Décentralisation et du Développement local avait annoncé, mercredi 19 novembre, la délivrance du récépissé définitif de reconnaissance à cinq partis politiques, les autorisant officiellement à exercer leurs activités.
Il s’agit du Front Citoyenneté et Justice, dirigé par Mohamed Jemil Mansour, du Parti Mauritanie en Avant, conduit par le Dr Nour Eddine Mohamedou, du Parti Autre Choix, présidé par l’ancien candidat à la présidentielle Mohamed Lemine Ould El Mourteji, du Parti pour la Préservation des Acquisitions Démocratiques, dirigé par l’ancien député Abderrahmane Ould Mini, ainsi que du Parti Croissance, présidé par l’ancienne députée Zeinebou Taghi.
Dans un communiqué publié sur sa page officielle Facebook, le ministère a précisé que ces autorisations permettent désormais aux partis concernés de contribuer pleinement à la formation et à l’expression de la volonté politique nationale.

Un test pour les réformes politiques en cours


En définitive, le dossier des agréments de partis politiques apparaît comme un test grandeur nature pour les réformes politiques annoncées ou engagées. Il met à l’épreuve la capacité des autorités à concilier ordre institutionnel et ouverture démocratique, régulation administrative et liberté politique.
L’issue de ce dossier, qu’elle se traduise par un déblocage rapide ou par la poursuite du statu quo, aura des répercussions durables sur la perception du pluralisme politique en Mauritanie et sur la confiance des acteurs politiques dans l’impartialité de l’État.

Saydou Nourou T.

RELATED ARTICLES

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

- Advertisment -
Google search engine

Most Popular

Recent Comments