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Hommage à Feu Moustapha Ould Mohamed-Saleck (4/4)

A l’occasion du 11ème anniversaire du décès du Président Moustapha Ould MOHAMED SALECK, CRIDEM et EVEILHEBDO online ont décidé de rendre hommage à celui dont le nom restera à jamais lié à deux évènements majeurs de l’histoire politique de la Mauritanie : (i) la paix au Sahara Occidental ; et (ii) l’arrivée des militaires au pouvoir en 1978.

Pour autant, et bien au-delà de ces deux faits, le parcours de Moustapha ould MOHAMED SALECK se confond bien avec l’histoire de la Mauritanie, depuis ces premiers pas de militant à Nahdha jusqu’à la présidence de la république.

A travers cette série de témoignages, il nous a été permis de constater que ce sont quasiment les mêmes mots qui reviennent lorsque l’on parle de ce que le Président Moustapha (comme l’appelle affectueusement ceux qui l’ont côtoyé) pouvait incarnait : Humilité, Dignité, Droiture, Piété, Amour de la patrie.

Après les témoignages de l’ancien Ambassadeur et Homme de Lettres feu Mohamed Saïd ould HOMODY et du colonel Athié Hamath, ancien Ministre, de Son Excellence feu Mohamed Mahmoud Ould Ahmed Louly, Ancien Chef de l’Etat, nous vous proposons ceux de Ladji Traoré et feu Mohamed Mahmoud Ould Ahmed Louly.


Témoignage de M. Ladji Traoré Secrétaire Général de l’APP

  1. Début d’une amitié

En réalité j’ai connu feu Moustapha Ould Mohamed Saleck de 1970 jusqu’à son décès. C’est un homme exceptionnel. Que son âme repose en paix.

En 1970, Moustapha était à Néma avec sa famille. Il fut, à la fois, responsable de la région militaire et Gouverneur de la 1ière région ; actuelle wilaya du Hodh Charghi. Et moi, en tant que syndicaliste et après avoir été relevé de mes fonctions de chef de service au ministère du Plan où j’étais adjoint de Sidi Ould Cheikh Abdallahi ; j’ai été relevé de mes fonctions fonction au lendemain du 1ier Mai et mis à la disposition du ministère de l’intérieur. Je débarquai, le 6 Mai, à Néma affecté à Oualata. Une sorte de résidence surveillée en règle mais qui ne dit pas son nom lorsqu’on m’a empêché de me rendre à Nouakchott pour le Baptême de ma fille. Lorsque je suis arrivé à Néma, je suis allé rencontrer le gouverneur Moustapha Ould Mohamed Saleck dans son bureau, ce qui m’a vraiment frappé, c’est qu’il m’a accueilli chaleureusement. J’ai senti qu’il était dérangé par cette mutation «sans précision de responsabilités ». Il m’a dit : « prenez votre temps avant de rejoindre votre poste à Oualata. On est au mois de mai et il fait chaud ».

Alors, je pris mes dispositions et me rendis à Oualata où j’ai été aussi très bien accueilli par tous, le Préfet mais aussi le chef traditionnel de cette localité, Bah Ould Guig qui était, également, responsable du parti du peuple mauritanien au pouvoir (parti unique). Il m’a accueilli avec d’autres personnalités et ils ont mis à ma disposition une maison ouverte sur la Mahadra de Oualata.

Pour revenir sur mes rapports avec le colonel Moustapha Ould Mohamed Saleck, je n’oublierai jamais, …l’autorisation qu’il m’a faite à titre exceptionnel pour me permettre de me rendre faire le baptême de ma fille alors que j’ai été débarqué de l’avion …. Il a fait bloqué l’avion le temps de signer mon autorisation ?????? …

Je dois aussi dire que, pendant tout mon séjour à Oualata, chaque fois que je venais à Néma, il me recevait chez lui où j’ai fait la connaissance de son épouse qui est une dame extrêmement agréable aussi. Donc, au lieu d’être le détenu politique à Oualata, quand je venais à Néma, j’étais reçu en ami. Depuis lors, nous le sommes restés.

Avec mes amis, nous allons faire la grève en 1971 qui nous coutera quatre ans de chômage forcé. Tous les responsables des KADIHINES qui avaient participé à cette grève ont été mis en prison ou en résidence surveillée. Moi-même, je fus mis en résidence surveillée mais dans d’autres conditions à Tamchekett et Tichitt. Ce fut aussi le cas pour d’autres collègues comme Moustapha Ould Bedreddine, Moustapha Ould Abeidrahmane, Dafa Bakary et d’autres. A Tamchekett, nous étions chez le gouverneur Ould Kerkoub. C’est une ville très enclavée à l’époque et très éloignée. C’était pour nous éloigner des autres KADIHINES et nous empêcher d’avoir des contacts avec notre mouvement qui s’était développé et devenu très dynamique à travers tout le pays. Le MND était présent dans toutes les capitales régionales, avec ses syndicalistes, ses élèves, ses militants fonctionnaires…

Après ces quatre années, j’ai fini par intégrer le Ministère du Commerce où Hasni Ould Didi était le Secrétaire général. Quand il fut demis de ses fonctions, il me dit : « voilà, Ladji, quand tu étais dans mon cabinet, on n’a pas voulu officialiser ta mission ici et moi, comme je quitte ce ministère, je ne veux pas te laisser ici par ce que il n’est pas sûr que tu seras bien avec mon successeur. Alors, dis moi, parmi les sociétés qui sont sous la tutelle de ce ministère, laquelle te convient ?

Je te conseille, d’ailleurs, d’aller à la SONIMEX, car il parait que tu es un ami à Moustapha Ould Mohamed Saleck qui va en être le directeur général.

Je lui répondis : « Ouallahi »

Il me dit : « Alors, je vais te détacher à la SONIMEX ».

C’est ainsi que je me suis retrouvé avec Moustapha à la SONIMEX.

  1. Un Homme juste et intègre

En 1977, à la SONIMEX, nous étions en rupture de stocks. J’ai été envoyé en urgence à Las Palmas pour y acheter du thé, voilà ce qui s’est passé : J’ai acheté un stock pour une valeur de 90 millions UM, mais ce stock n’arrivera jamais. Je pense que ce fut la chose qui l’a le plus choqué.

En réalité, nous avons fait toutes les procédures d’embarquement de ce thé, ce fut par crédit documentaire. L’argent fut payé sur la base d’un manifeste d’embarquement qui s’était avéré faux. Alors, nous attendions le thé qui n’arrive pas et les gens commençaient à dire que Ladji en a profité pour s’enrichir, se faire de l’argent, etc. Le colonel Moustapha m’appela pour me dire : Que se passe-t-il ?

Je lui répondis : Monsieur le directeur, ne vous inquiétez pas. Nous avons fait l’objet d’une escroquerie comme ce qui arrive souvent entre la Mauritanie et les Iles Canaries. Cet argent qui appartient au pays sera restitué à la SONIMEX et la confiance que vous avez placé en moi ne sera jamais trahie, car cet argent n’a été détourné ni par moi ni en complicité avec moi.

On a mené notre enquête. Je suis parti là-bas en compagnie du conseiller commercial, un Libano-syrien …. et Hamoud …., l’ancien président du conseil d’administration.

A la suite de cette enquête, on a mis sous les verrous l’homme qui avait fait la facture pro-format, les agents espagnols de la banque qui ont détourné l’argent en dollars. Les complices mauritaniens, qui m’avaient mis en contact avec le vendeur avec qui ils s’étaient mis d’accord pour détourner l’argent, furent arrêtés également.

Lorsque je suis revenu lui présenter les résultats de notre enquête de Las Palmas, avec le concours du consul et l’expert espagnol de la place, je lui ai dit : Monsieur le directeur, voilà les preuves selon lesquelles notre thé a été embarqué sur un bateau allant vers le Liberia et qui ne fait pas d’escale en Mauritanie. Les gens nous ont truandé et nous sommes allé à la banque réclamer notre argent, alors que la police espagnole a arrêté tous ceux qui à la banque ont participé au détournement de ce marché et tous leurs complices.

Soyez tranquille. Vous m’avez envoyé pour une mission et cette mission a été bien accomplie selon vos instructions et à votre morale. L’argent de la SONIMEX et de l’Etat mauritanien n’est pas perdu. Je sentais qu’il n’était pas moralement en forme pendant toute la semaine qu’a duré cette affaire, et lorsque je lui ai présenté les preuves, nos rapports de confiance se sont rétablis. Tel fut ce grand patriote intègre, honnête et pieux.


Témoignage de Son Excellence feu Mohamed Mahmoud Ould Ahmed Louly, Ancien Chef de l’Etat

Nous devons, de prime abord, prier pour l’âme de feu Moustapha Ould Mohamed Saleck en qui j’ai connu un homme croyant, pieux et patriote.

Lorsque les officiers de l’armée nationale ont décidé de faire le coup d’état du 10 Juillet 1978, j’ai préféré rester à l’écart parce que je ne voulais pas prendre part à un acte dont je ne connais pas les conséquences éventuelles par rapport à mes responsabilités devant Allah.

Cependant, je fus membre du Comité militaire qui prit le pouvoir et Moustapha fut son président. Le coup d’état s’est très bien passé. Al hamdoulillah, les choses se sont déroulées de la meilleure manière, dans la mesure où tout s’est passé en toute douceur sans la moindre goutte de sang versée et ni même la moindre violence.

Il faut reconnaitre que le coup d’état de 1978 était l’ultime recours pour mettre fin à la situation désastreuse qui prévalait, alors, en Mauritanie. Le pays était en proie à une guerre dévastatrice qui ruinait son économie encore fragile et menaçait son existence même.

Moustapha a conduit le changement de manière responsable qui n’a exclu personne. Il fut choisi par ses compagnons officiers des forces armées nationales et il ne cherchait pas spécialement le pouvoir. Il tenait, d’ailleurs à s’en débarrasser aussi vite que possible pour le remettre aux civils. Mais, vous savez, les querelles et les divergences entre les hommes peuvent, parfois, ne pas permettre d’atteindre les grands objectifs, aussi nobles ou salvateurs soient-ils. C’est ainsi que Moustapha préféra s’éloigner par souci de garder sa conscience intacte.

Je dois, pour la vérité, dire que tout au long des années que nous avons passées ensemble, au sein de l’armée, il a toujours eu une considération toute particulière à mon égard. J’en avais aussi beaucoup pour lui. Ce fut un homme pieux, un officier intègre, un président honnête et digne de respect. Prions pour sa mémoire.

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