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Les 50èmes assises de l’UPF à Dakar placées sous le thème « Médias, Paix, Sécurité »

La capitale sénégalaise a abrité du 09 au 11 janvier courant es 50èmes assises de l’Union Internationale de la Presse Francophone (UPF) placées cette année sous le thème : « Medias, Paix, Sécurité »

 Ces assises ont bénéficié d’une attention particulière de la part des autorités sénégalaises représentées respectivement par le président de la République Macky Sall et son premier ministre Amadou Bâ qui ont assurés tour à tour la supervision des cérémonies d’ouverture et de clôture.

Plaidoyer du président Macky Sall

Devant 200 journalistes représentant 43 pays francophones venus des 4 coins du monde, le président Macky Sall a affirmé que le Sénégal, pays de la « Téranga » est une terre de paix et de liberté qui accueille à bras ouvert, les journalistes, les artistes, les écrivains…Il  a rappelé l’importance de la presse dans un régime démocratique. Et le président sénégalais de déclarer, je cite : « A l’âge de la sagesse, votre organisation a plus de 70 ans, il est plus qu’opportun de réfléchir sur votre profession, dans un monde soumis à plus d’incertitudes et de menaces sur la paix et la sécurité. » Et le président Sall de se demander : « Comment les médias peuvent-ils rester le porte-étendard inusable des libertés démocratiques tout en étant les hérauts des vertus universelles qui fécondent la paix et la sécurité dans un monde en perpétuelle ébullition ? Et surtout quel est et quel doit être le rapport des medias à cette époque critique de l’histoire où, à nouveau, les confrontations entre les peuples se multiplient avec tant de barbarie ? »

Et le président sénégalais d’affirmer que : « Les médias, à n’en pas douter, doivent plus que jamais tenir haut le flambeau qui éclaire et guide l’humanité vers ce qu’elle a de meilleur : la paix et la sécurité sans lesquelles aucun progrès durable ne se construit. »

Des questions se posent également quant à la pratique du journalisme par des blogueurs et autres activistes qui, pour autant, ne s’encombrent pas des normes qui encadrent la profession.

En tout état de cause, note le président Sall nous avons tous intérêt à la préservation du journalisme au sens noble du métier, celui de la sacralité des faits et du progrès des sociétés humaines.

Et de rappeler que c’est ainsi que le veut la Charte de Munich de 1971, endossée plus tard par la Fédération internationale des journalistes, les règles d’éthique et de déontologie de la profession demeurent immuables.

Aujourd’hui comme hier, le respect de la vérité des faits et de la vie privée, l’obligation de rectification immédiate en cas de publication d’information inexacte, l’interdiction de calomnier, de diffamer et d’inciter à la haine restent des exigences intangibles qui accompagnent et valorisent le métier de journaliste.

Enfin Macky Sall a salué la contribution que ses prédécesseurs, les Présidents Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf, ont chacun apportée à l’édifice francophone.

Intervention du Délégué Général de l’APF

Pour sa part le député français Bruno Fuchs, Délégué Général de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF) a estimé dans son intervention à l’occasion du lancement des assises que l’UPF avec « Medias, Paix et Sécurité » a choisi le meilleur thème possible.

Et de noter que l’année 2024 est justement l’année de tous les risques.

Dans les 12 prochains mois des élections vont avoir lieu dans 76 pays dans le monde. Elles vont concerner 4,1 milliard de personnes soit 51 % de la population mondiale avec des nations cruciales sur l’échiquier géopolitique comme l’Inde, les États-Unis, l’Indonésie, le Pakistan,  la Russie, le Sénégal…

Les enjeux sont majeurs car estime le député Fuchs, les démocraties n’ont jamais été autant menacées.

Il y a une quinzaine d’année affirme le Délégué Général, on imaginait, un peu naïvement certainement, que les démocraties allaient s’imposer progressivement dans la grande partie des pays du monde, suivant en cela le développement des échanges économiques et apportant aux populations, la liberté, la prospérité et la paix.

En ce début 2024 on voit bien que l’inverse avec les  modèles démocratiques attaqués violemment de toute part: Aspirations nationales/populistes à la Trump ou Bolsonaro, Impérialisme, Russe ou chinois, intégrisme religieux,  et même Wokisme,

A cela s’ajoute la désinformation, les deap-fake, les guerres hybrides,  ou encore le hacking d’État contre État.

Cette menace est d’autant plus forte qu’elle s’accompagne d’un inquiétant appauvrissement du débat public, d’une augmentation des violences et en corolaire un fort désintérêt des concitoyens pour la chose publique.

Aujourd’hui, quand on prend encore le temps d’aller dans un bureau de vote beaucoup ne se déterminent plus vraiment pour un idéal ou pour des projets, regrette le député français.

Les scrutins sont devenus le réceptacle de toutes les angoisses : celle de la peur de l’autre, celle du lendemain, celle de la fin du mois ou encore celle du monde qui change.

Dans ce bruit permanent, les promesses simplistes ne font que nourrir la désillusion et affaiblissent nos institutions.

Et Fuchs de préconiser qu’il faut faire très attention car la démocratie n’est pas un acquis. La cohésion sociale et la paix ne le sont pas plus.

Et là les médias ont dit-il un rôle majeur à jouer.

Ils jouent un rôle essentiel dans la communication, la diffusion de récits, l’obligation des dirigeants de rendre compte de leurs actes, le partage des expériences et l’élaboration d’un imaginaire collectif.

Ils interviennent aussi dans la qualité du débat public que l’on veut contradictoire et non pas ce mode du buzz et du clash qui est devenu celui des media sociaux.

Mais les médias eux-mêmes sont dans la tourmente.

Face à ce grand mouvement qui attise les réseaux sociaux, la  presse a du mal à résister. Et si on prend le cas des Etats-Unis :

2500 journaux ont disparu en 20 ans et avec eux 43000 journalistes soit presque 2/3 des effectifs des rédactions.

Toujours dans le même laps de temps les revenus ont baissé de 50 milliards de $ à 20 milliards de$.

Et pourtant sans presse locale la participation aux élections baisse, les citoyens sont de moins en moins informés sur le fonctionnement de leurs institutions.

En 1966 70% des électeurs connaissaient le nom de leur maire, en 2020 ils sont moins de 40%.

Le contexte africain n’échappe pas à ce constat : la liberté de la presse n’y est pas simplement un droit, mais une nécessité cruciale. Elle révèle les abus de pouvoir et favorise la participation citoyenne.

Elle agit comme un contrepoids contre la corruption, contribuant ainsi à bâtir des nations fortes et responsables.

En Afrique comme ailleurs, les médias sont donc un instrument de renforcement de la légitimité des institutions et contribuent à forger des nations fortes et responsables, des conditions essentielles pour garantir la stabilité et la sécurité à long terme.

La Bonne santé de la presse c’est la garantie de la vitalité du débat public, la capacité à accepter un compromis ou une alternance.

A l’inverse des médias faibles, c’est l’incompréhension et de plus en plus souvent  la violence qui s’expriment.

Et c’est faire lit des populistes, et demain des fondamentalistes, avertit Mr Fochs.

Mot du Président de UPF International

Dans son mot d’ouverture Madiabal Diagne, président de UPF International a souligné que l’organisation qu’il dirige n’a pas manqué d’être durement éprouvée ces dernières années. « La vie associative, faite de rencontres physiques et de moments de communion, nous a beaucoup manqué » a-t-il lancé.

Mr Diagne s’est beaucoup apaisanti sur la situation de la presse au Sénégal qui a connu beaucoup de soubresauts ces derniers temps.

Il a déclaré que le rayonnement international du Sénégal ne se mesure pas à l’aune de son poids économique ou démographique, encore moins de sa puissance de frappe militaire. 

Le Sénégal dit-il est surtout connu et reconnu pour la qualité de ses fils et filles, encore et encore, pour le leadership de ses dirigeants, pour son modèle démocratique.

« Petit pays mais non moins grande Nation, le Sénégal est nanti d’une grande voix, fortement audible en Afrique et sur la scène mondiale. » a souligné le président de l’UPF.

C’est grâce à cette liberté et à la vision du président Sall que Dakar et le Sénégal ont bien changé de visages, a-t-il noté.

S’adressant au député Bruno Fuchs,et à travers lui à la France, Madiabal a affirmé faisant allusion à l’attitude de la France vis-à-vis de certains opposants sénégalais dont Sonko notamment : «  J’interpelle votre statut de parlementaire français même si vous êtes invité en votre qualité d’une responsable d’une organisation internationale. La France serait en faute si elle mettait, sur un même pied, des hommes politiques de cet acabit avec des autorités qui ont la légitimité des suffrages de leurs concitoyens !

Vous comprenez alors notre indignation que certains hommes politiques français couvrent d’aussi sordides personnages de la dignité de détenus politiques ! Chez eux, ils les auraient appelés de « dangereux terroristes.

Cette France, que nous aimons tant, ne doit pas verser dans un maladroit équilibrisme. En toute franchise et en toute amitié, je vous l’ai dit Monsieur le député Fuchs et je le dis régulièrement à mes interlocuteurs officiels français. En effet, cette France est « exaspérante et séduisante en même temps », pour reprendre le mot de Léopold Sédar Senghor.

Leçon inaugurale des assises

La leçon inaugurale de la cérémonie d’ouverture a été assurée par Jorge Carlos Fonseca, ancien président de la République du Cap-Vert, professeur à l’université et éminent conférencier.

Pour lui la presse libre joue un rôle fondamental et contribue à l’ancrage de la citoyenneté. En effet le journalisme crédible avec une couverture impartiale des événements cultive le public et promeut le dialogue entre les différents partenaires de la société et entre les différentes cultures. Cela participe au maintien de la paix sociale.

Les journalistes sont des instruments de l’information qui sensibilisent  et jouent un rôle important dans la prévention des conflits.

La situation géopolitique actuelle est marquée par la montée des extrémismes partout dans le monde et surtout en Afrique.

Pour Fonseca qui a passé 2 mandats de 5 ans à la tête de son pays et qui se considère aujourd’hui comme : « un simple jardinier de la liberté et de la démocratie et un défenseur et apologiste de la paix », les médias peuvent et doivent jouer un rôle crucial dans la promotion de la paix et de la sécurité. Et  pour ce faire ils doivent s’appuyer sur un narratif promouvant le dialogue interculturel et intergénérationnel.

Elles doivent aussi passer au peigne fin les politiques publiques.

S’agissant des défis, les médias traditionnels doivent aujourd’hui faire face à la concurrence des Réseaux Sociaux avec les fausses informations, le discours de la haine et l’exacerbation des tensions. D’où la nécessite de la mise en place de mécanismes de vérification des faits. C’est là dit-il un grand défi pour le journalisme professionnel et pour la démocratie.

Mais rappelle Fonseca, il n’y a pas démocratie sans medias libres dénonçant toutes les dérives et assurant le débat sur l’équilibre des pouvoirs. En effet les medias libres sont les piliers de l’Etat de droit et la liberté de la presse est un élément vital du système démocratique.

Donc note Fonseca, l’illusion aujourd’hui c’est de croire que la paix et la sécurité en Afrique peuvent s’obtenir en érigeant des autocraties.

L’oppression, la tyrannie, la misère et les inégalités constituent un cercle vicieux. La presse doit constituer de ce point de vue un rempart pour la paix, la justice, la démocratie et le progrès.

Mais poursuit le professeur Fonseca, la démocratie est un processus inachevé, avec des avancées et des reculs et demande beaucoup de patience. Pour lui la liberté est une valeur et la démocratie qui n’est pas un modèle unique est un instrument qui doit garantir la liberté.

Il a ajouté que le journalisme d’investigation est fondamental pour dénoncer et pointer du doigt les anomalies afin de conduire à des réformes.

Le monde a besoin de paix, souligne le conférencier et l’Afrique a besoin de paix et de sécurité pour se développer. « Nous avons besoin d’une culture de paix, pas celle imposée à des peuples par la voie illégitime. » et cette dynamique de paix doit, dit-il être orientée vers le respect des Droits de l’Homme, un des fondements les plus sûrs de la paix.

S’agissant des journalistes, le président Fonseca est catégorique, il ne peut y avoir de journalisme sans liberté et pluralisme de l’expression.

En conclusion le conférencier a rappelé qu’un journalisme libre rime avec la liberté avec des medias capables de dénoncer les abus.

Aucune société ne pourra se développer sans la liberté et des citoyens libres.

Enfin dernier point important, l’illusion de croire que la paix et la sécurité en Afrique peuvent s’obtenir en érigeant des régimes autoritaires basés sur le tout sécuritaire.

Pour l’ex président du Cap-Vert, en Afrique nous n’avons plus besoin de recettes et autres projets à long terme genre Agenda 2063. Pour lui les pouvoirs africains doivent cesser de pleurnicher en accusant les autres d’être à l’origine de leurs maux. Ces pouvoirs ont du pain sur la planche et doivent travailler et obtenir des résultats dans moment présent.

La cérémonie de clôture des 50es Assises de l’UPF a été présidée par le Premier ministre sénégalais Amadou Ba, en présence du président de la plus grande association de la presse francophone, Madiambal Diagne.

Dans son discours, le chef du gouvernement sénégalais et potentiel successeur de Macky Sall a mis en exergue le rôle crucial des journalistes dans le maintien de la paix dans le monde. Il a qualifié cette question de « majeure » en ces temps troublés. « En tant que journalistes au sein de l’espace francophone, vous êtes interpellés quant à vos responsabilités dans l’édification d’une humanité en perpétuelle quête de justice et d’équité », a-t-il martelé.

Amadou Ba a a aussi souligné les dangers de la désinformation, la manipulation et toutes les tentatives de contrôle des médias, surtout en temps de guerre ou de conflit, au détriment de la qualité du travail journalistique. Selon lui, les journalistes doivent valoriser « la vérité et la connaissance de l’humanisme, surtout à l’ère de la digitalisation où foisonnent les informations considérées comme de l’intoxication sur les réseaux sociaux ».

Abordant les risques terroristes qui étaient au centre d’un atelier des Assises, le Premier ministre sénégalais a souligné les responsabilités sociales des journalistes dans le but d’éviter les manipulations malsaines et la désinformation massive ». Il a conclu en rappelant que « ce sont les médias qui construisent la paix ».

A noter enfin que ces 50èmes assises de l’UPF ont été marquées par l’organisation de plusieurs tables rondes et ateliers de haut niveaux sur le rôle et la place des medias en temps de guerre ; la désinformation et la manipulation de l’information ; la paix et la sécurité à l’ère des réseaux sociaux ; les medias et les enjeux de la sécurité alimentaire ; Comment concilier liberté et responsabilité ; Medias et terrorisme : comment informer et sur la question de savoir s’il existe des medias pour la paix.

Bakari Gueye/Dakar

(Nous y reviendrons)

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