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Feu Moustapha Ould Saleck : La transition sera de deux ans, le temps de mettre en place un système démocratique civil*

J’ai d’abord eu à connaitre feu Moustapha Ould Mohamed Saleck au cours des années 1950-1954. Quand il était en Troisième au Collège de Rosso, j’étais un peu après lui, bien que nous ayons presque le même âge. Nous étions peu nombreux dans cette filière scolaire et donc tout le monde se connaissait.

Nous avons eu l’occasion, par la suite, de nous connaître plus amplement et de nous apprécier en particulier lorsqu’il fut désigné Chef de l’Etat-major, j’étais Ministre de l’Education Nationale. Même si la vie professionnelle nous séparait, chacun de nous recevait des nouvelles de l’autre. Nous nous connaissions, donc, assez bien.

Le président Moustapha a eu à occuper de nombreux postes de responsabilité tant sur le plan militaire que sur le plan civil. Il a notamment été Gouverneur de plusieurs régions où il fit preuve de beaucoup d’honnêteté, de probité et de justice. Sa gestion des deniers publics a toujours été rigoureuse. Il tenait à ce que chaque sou dépensé le soit utilement. C’est bien la réputation qu’il avait à notre époque.

Il fut aussi un brillant officier et le premier à avoir accepté de passer le concours de capitaine. En fait, auparavant, la promotion à ce grade s’effectuait de façon automatique : on passait du grade de lieutenant au grade supérieur. Certains de ses frères d’armes avaient, soit refusé cette épreuve ; soit été éliminés parce qu’ils n’avaient pas le niveau académique requis. Donc, il a été l’unique candidat au concours de capitaine qu’il a brillamment réussi.

Je me souviens des événements intercommunautaires de 1966, alors qu’il était chef d’Etat-major, il a finalement été appelé pour rétablir l’ordre et la sécurité publics à Nouakchott, ce qu’il a fait parfaitement, avec l’aide des officiers Soueidatt et Thiam. J’étais alors ministre de l’éducation nationale.

Plus tard, quand il y eut le coup d’état du 10 Juillet 1978, j’étais à Dakar où j’assurais les fonctions de secrétaire général de l’OMVS. J’avoue que la nouvelle m’avait choquée, car je craignais pour la Mauritanie et pour son existence même en tant qu’entité. Mais lorsque j’ai entendu, dans l’après-midi, sur les ondes de la radio, la composition comité militaire et appris, par la suite, que c’est Moustapha qui prenait en main les rênes du pouvoir, je fus totalement rassuré.

Le président Moustapha connaissait parfaitement son pays pour en avoir pratiquement fait le tour au cours de ses divers parcours militaires et civils. Il connaissait bien les différentes composantes de la population et les rapports entre les communautés mais aussi les problèmes qui existaient parfois entre ces différentes composantes. Bref, il connaissait, vraiment la Mauritanie et cela était un élément très rassurant pour moi. J’ai donc été complètement tranquillisé en apprenant que c’était lui qui prenait le pays en charge.

Comme je l’ai évoqué lors d’une récente interview, parlant de ma première audience à la Présidence à l’occasion de ma nomination au poste de directeur général de la SNIM, nous avions discuté de l’avenir politique du pays et de sa propre vision des choses. Il m’avait alors bien précisé deux intentions: (i) que l’armée resterait au pouvoir pour une période de deux ans, au maximum, le temps nécessaire de mettre en place un système démocratique civil; (ii) qu’au-delà, l’armée se tiendrait en dehors du pouvoir et de la vie politique dans son ensemble et se limiterait à son rôle de garante de la sécurité du pays. Voilà le résumé du projet politique du mouvement du 10 juillet tel qu’il me l’a exposé.

Je peux assurer que c’était un homme honnête, juste, bon musulman et, surtout, un patriote sincère. Il avait, donc, assez d’atouts qui permettent de penser que son action aurait été très bénéfique pour la Mauritanie, s’il était resté pour mener une transition démocratique apaisée, sûre et durable.

« Témoignage d’ Ely Ould Allaf, ancien ministre, ancien ambassadeur

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